
En 2014, les membres du conseil municipal avaient le sourire après l’élection du maire Abed Karnoub. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Au premier rang sur la photo, les adjoints au maire Bernard Christophe (1 à gauche), Marie-Françoise Jacques (2 à gauche), Annette Ribière (4 à gauche), ainsi que Jean-François Cornier (au second rang, 2 en partant de la droite) ont démissionné (photo d’archives).
« Un maire n’est pas un chef d’entreprise. Il ne doit pas considérer ses adjoints comme ses salariés. » Après plus de 42 ans passés au service de la municipalité de Saint-Ouen-de-Thouberville (Eure), Bernard Christophe n’imaginait sûrement pas vivre une fin de carrière politique aussi tourmentée. En désaccord avec la méthode de gouvernance du maire Abed Karnoub, l’adjoint au maire a décidé de démissionner. À ses côtés, trois autres adjoints Jean-François Cornier, Marie-Françoise Jacques et Annette Ribière, ont pris la même décision. Résultat, il ne reste plus qu’un seul adjoint en poste.
Manque de communication
Les quatre adjoints assurent ne pas démissionner sur un coup de tête, ni par ambition électorale. Leur décision est mûrement réfléchie. Ils reprochent au maire de « piloter » seul la commune, sans concerter les élus du conseil municipal : « Dans un courrier que nous avions adressé au maire le 18 février dernier, nous soulignions déjà le manque de communication de sa part et le risque d’un comportement autoritaire », explique Marie-Françoise Jacques.
Quelques mois plus tard, la situation ne s’est pas arrangée. « Un maire ne fait pas ce qu’il veut parce qu’il est maire. Toute décision doit être soumise au sein du conseil municipal. Il se doit de travailler en équipe. Il ne tient pas compte de nos propositions qui pourraient nourrir sa réflexion », critique Bernard Christophe élu sans interruption depuis 1977.
Les adjoints démissionnaires ne nient pas la bonne volonté du maire de monter des projets pour sa commune. Mais certains dossiers ne seraient jamais débattus en séance de conseil municipal. C’est le cas du projet de créer une commune nouvelle envisagée cet été entre Saint-Ouen-de-Thouberville et Bosgouët. Cette fusion a été rejetée par les élus de Saint-Ouen.
Autre exemple de dossier non concerté : la construction d’un terrain de tennis couvert :
« Le maire a déposé un dossier d’un montant de 800 000 euros. Il ne peut pas engager de dépenses sans en avertir ses élus », s’indigne Bernard Christophe.
À moins d’un an et demi des prochaines élections municipales, les quatre adjoints assurent qu’ils ne remettront plus les pieds en mairie comme ils le font chaque jour. « On se rendra à la mairie uniquement pour assister aux réunions du conseil municipal. Le maire n’a pas besoin de nous, donc on s’en va », conclut avec amertume Bernard Christophe.
Le maire se défend. Selon Abed Karnoub la démission de ses quatre adjoints n’est pas vraiment une surprise. « Cela fait plusieurs mois qu’ils sont entrés en opposition flagrante et systématique avec moi. Ils ont formé un clan. Leur décision est logique et cohérente. Un adjoint ne peut pas être en opposition avec le maire. » Concernant son comportement jugé autoritaire par les adjoints démissionnaires, Abed Karnoub préfère ne pas s’étendre sur cette accusation. Il répond seulement : « Je ne souhaite pas entrer dans une polémique. Je ne suis pas autoritaire. Je veille à l’intérêt de la commune », déclare-t-il. Désormais, le cinquième et dernier adjoint encore en poste devrait devenir premier adjoint. « Je vais devoir trouver quatre nouveaux adjoints. Le fonctionnement de la commune ne va pas en pâtir. »